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olier Dabadie. Là, nous sommes sur les sommets de la chanson
française. Prenez La Chanson d’Hélène, l’un des premiers morceaux
qu’il écrivit : coup d’essai, coup de maître. Accompagnée de la mu-
sique de Philippe Sarde, chantée par Romy Schneider et Michel
Piccoli, la chanson a, depuis la sortie des Choses de la vie, offert au
film une vie plus belle, plus forte, plus émouvante, prolongeant de
quelques mots, de quelques notes, la trace ineffaçable qu’il aura
laissée dans les esprits.

Jean-Loup avait de qui tenir puisque son propre père était le
parolier de Maurice Chevalier et des frères Jacques. Il n’empêche :
au-delà d’une technique éprouvée et d’une inspiration extraor-
dinairement large, il porte la voix d’une génération, femmes et
hommes confondus. Je voudrais citer L’Addition, œuvre restée
méconnue, chantée par le Yves Montand dernière période, dotée
d’une clairvoyance politique qui dit tout en quelques vers (« de
Prévert »), œuvre testamentaire d’une certaine génération dont
le caméléon Dabadie a endossé aisément les habits.

Je voudrais mentionner aussi Lettre à France puisque je quali-
fiais plus haut son univers de très français : « Depuis que je suis
loin de toi, je suis comme loin de moi… » Un texte étonnant,
qui dit la mélancolie de l’exilé, la composition musicale et la voix
de Michel Polnareff font le reste. Il ne faut pas oublier non plus
qu’en 1980 Jean-Loup Dabadie écrit L’Assassin assassiné pour
Julien Clerc, plaidoyer contre une peine de mort qui n’avait pas
encore été abolie par François Mitterrand et Robert Badinter.
Humanisme intransigeant, vision du monde : les poètes résument
l’esprit de leur temps, et marquent leur époque – Jean-Loup
Dabadie l’aura fait.

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