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mage est le meilleur moyen pour raconter un film. La caméra se perçoit ainsi
dans les trois films comme un acteur à part entière, qui rend le spectateur actif.

Pour l’historien Marc Ferro7 : « la réalité dont le cinéma offre l’image
apparaît terriblement vraie. » En effet en visionnant ces trois films, le spectateur
comprend que l'image cinématographique permet de capter l’attention. Quand
nous regardons un film, nous acceptons de croire à la réalité des images projetées
sur l'écran. Car même si dans ces trois fictions, l’Histoire est reconstituée par le
biais d’une mise en scène et du point de vue du cinéaste, les images sont
suffisamment travaillées pour recréer l’atmosphère et l’ambiance d’une époque. Une
image filmique par essence semble vraie, car la caméra enregistre de manière
directe et réelle des évènements. Le temps au cinéma se vit au présent, au même
rythme que les personnages. Ainsi même si l’image est fabriquée pour reconstituer
une réalité, le spectateur se laisse prendre par le tourbillon des images et d’une
mise en scène filmique. Lelouch interpelle alors le spectateur par des images fortes
dès le début de ces trois films. Le spectateur vit et ressent ainsi les évènements
grâce à l’activité de la caméra.

Dès le début des trois films, le réalisateur place sa caméra comme
témoignage de l'Histoire. Nous l'avons vu, les séquences d'exposition et d'ouverture
des films sont riches en personnages et situations fictives, de sorte à ce que le
spectateur soit au coeur de l'action en s'attachant à ceux-ci. C'est pourquoi si en
voyant des personnages forts auxquels celui-ci croit, le spectateur pourra mieux
accepter le fait que fiction et réalité s'imbriquent. Reconstituer l'Histoire par le biais
de personnages inventés, permet de mieux s'identifier à la reconstitution filmique.

Toutefois si les trois films s’attachent à repenser des événements
historiques en faisant appel à la mémoire collective des spectateurs, il convient
pour mieux saisir l'esprit des films, d'expliquer les liens étroits unissant la mémoire
et l'Histoire. Pour Henri Rousso8 : « la mémoire est un vécu en perpétuel
évolution tandis que l'Histoire est une reconstruction savante et abstraite ».

Il poursuit en expliquant que : « la mémoire est plurielle (…) La
mémoire se révèle comme une organisation de l'oubli. »

7 Voir page 39 dans l’ouvrage Cinéma et Histoire 14
8 Voir page 11-12 dans l’introduction de l'ouvrage Le Syndrome de vichy de 1944 à nos jours.

Claude LELOUCH : une vision intimiste de L’Histoire
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