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fla la mi-temps, ce qui permit aux joueurs et aux supporters
de souffler un peu. À Carigoules, on reprit un verre pour
s’encourager et on grignota des petites choses que la femme de
Louis avait cuisinées.

Soudain la porte du bar s’ouvrit et un grand gaillard entra.
Nicolas le reconnut immédiatement.
Même s’il avait perdu des cheveux ainsi que sa frange qui
plaisait tant aux filles, il faisait encore une tête de plus que tout
le monde et son regard avait toujours la même clarté
reconnaissable, la même pureté envoûtante.
Ses yeux se calèrent sur ceux de Nicolas, entouré comme un
messie par les clients du bar.
— Oh Malartigues, devine qui est là ? Éructa le vieil Albert.

Un revenant, tu ne vas pas le croire…
Nicolas se leva pour faire face à son ami qui n’avait pas
encore dit un mot, ni esquissé le moindre sourire.
En rentrant à la ferme, Karine lui avait expliqué qu’un type
était venu le voir dans la matinée. Il s’était présenté comme l’un
de ses amis d’enfance. Quand elle lui avait dit qu’il s’appelait
Nicolas Giordano, Alexandre n’avait pas voulu la croire.
Giordano chez lui ! Etait-ce seulement envisageable ?
Quand Karine lui avait précisé qu’il l’attendait au café du
centre, il avait longuement hésité. Déjà à cause du match de foot
qu’il aurait aimé voir tranquillement chez lui mais aussi parce
qu’il ne savait pas s’il avait envie de le revoir.
À la mi-temps, il avait fini par prendre son 4X4 pour se
diriger vers le centre-ville. Karine l’avait regardé partir sans un
mot. Il était dans sa bulle et n’entendait plus rien. Il avait eu le
temps de ressasser le passé pendant les quarante-cinq premières
minutes du match. Lui non plus n’avait pas oublié Nicolas.
Toutes ces années passées en sa compagnie, leur insouciance,
leurs bêtises, leur envie commune de croquer la vie avaient
ressurgi comme des fantômes…

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