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ir ainsi le plan séquence où Annie Girardot court après la voiture allemande,
afin d’empêcher l'arrestation des Lerner. Ces deux séquences demeurent construites
de la même façon. Nous retrouvons une caméra au coeur de l'action dans les deux
films. Claude Lelouch comme Rossellini, varient l'échelle de plan et jouent sur
l'alternance des points de vue ; perceptible par la présence des champs contre-
champ, se situant du côté des Allemands ou du côté des protagonistes témoins de
la rafle. Les deux films veulent montrer avec authenticité la réalité de l'Allemagne
nazie. Pour les deux metteurs en scène, il s'agit de placer le spectateur comme
témoin de l'action.
A noter que le film de Rosselini sert de témoignage quasi documentaire, car il fut
tourné en 1945 ; pour dénoncer « à vif » la barbarie nazie. Il fut par ailleurs
tourné en extérieur dans une Italie en ruine.

Ainsi reconstituer l'Histoire, signifie être au plus près de la réalité. Enfin nous
constatons dans les deux films, l'importance d’une musique extra diégétique pour
conférer à ceux-ci, une vision à la fois lyrique et dramatique.

En revanche le film de Steven Spielberg, La Liste de Schindler (film postérieur
à les Uns et les Autres et Partir Revenir, mais antérieur aux Misérables de Lelouch)
est un film que Lelouch a dû s'inspirer de loin, au moment du tournage des
Misérables (même si les séquences d'embarquement des juifs, dans les trains vers
Auschwitz semblent équivalentes). Pourtant il est nécessaire de parler un peu de
cette autre vision de l’Holocauste, afin de comprendre comment le cinéma selon
Spielberg, reconstitue l’Histoire à travers l’innommable et l'irreprésentable. Chez
Spielberg il y à tout d'abord, cette notion d'éthique et de morale ; voir ainsi la
séquence d'adieu entre Oscar Schindler et Isaac Stern son secrétaire, lui remettant
une bague en hébreu où est inscrite la mention « quiconque sauve une vie, sauve
l'humanité tout entière ».

Tout le film est ancré par cette dimension humaniste et morale. Le film est
basé sur une histoire vraie, Oscar Schindler a vraiment existé et sauvé 1100 juifs.
Au début du film, le personnage de Schindler (incarné par Liam Neesson) est un
industriel nazi qui ne pense qu'au profit et à l’argent, ce n'est que petit à petit qu'il
va aller vers la rédemption en décidant de sauver les ouvriers juifs. Voir ainsi la
séquence de la rafle dans le ghetto : Oscar Schindler est témoins du massacre et
à partir de là, son regard change progressivement.

Claude LELOUCH : une vision intimiste de l’Histoire. 79
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