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Chemin vers la fondation
Au printemps 1919, William Daus publie chez Hachette un petit guide de
Paris en langue anglaise dont il envoie un exemplaire à Perry le
22 avril 1919, mais en dehors d’un rappel au bon souvenir de Mulholland,
son message ne signale aucun progrès dans la constitution d’un club
parisien. Sans autres nouvelles durant le reste de l’année, Perry finit par
perdre patience et décide de changer de braquet. En février 1920, le Board
nomme ainsi des responsables spécifiques chargés de la constitution de
nouveaux Clubs dans des pays-cibles dont la France et l’Espagne. Pour la
France, le choix se porte sur John Edward Lloyd Barnes, past-gouverneur
du district du Royaume-Uni, qui s’était distingué en 1917-18 dans
l’organisation de l’accueil en Angleterre de permissionnaires du front
français, en liaison avec l’YMCA britannique. YMCA, encore… Pour l’Espagne,
le responsable nommé est Angel Cuesta, membre du Club de Tampa en
Floride, fondateur du Club de La Havane en 1916.
Pour comprendre le processus de naissance du Club parisien, il est utile
d’avoir à l’esprit le contexte des années de sortie de guerre. Le traité de
Versailles signé le 28 juin 1919 relève davantage de la symbolique que
d’une réelle volonté de paix. Versailles est choisi comme lieu de signature
pour effacer symboliquement la défaite française de 1871, car c’est ici, dans
la même Galerie des Glaces, que fut proclamé l’Empire allemand le
18 janvier 1871. Le projet de traité est remis à la délégation allemande le
7 mai 1919, date d’anniversaire du naufrage en 1915 du paquebot
britannique Lusitania torpillé par un sous-marin allemand et la date de
signature fixée au 28 juin est celle de l’anniversaire de l’attentat de
Sarajevo en 1914, déclencheur de la Grande Guerre. L’Allemagne ne se
résignera à signer que devant la pose par la France d’un ultimatum de cinq
jours au-delà duquel l’Armée française envahirait l’Allemagne. En raison
d’un conflit entre Républicains et Démocrates en période préélectorale, le
traité ne sera jamais ratifié par les États-Unis : il manquera sept voix au
Sénat pour la majorité des deux tiers requis pour la ratification des traités
internationaux.
Vu d’Allemagne, le traité est perçu comme un « Diktat ». France et
Allemagne demeurent irréconciliables. Déjà le 5 avril 1920, les troupes
françaises occupent la Ruhr en représailles de l’entrée de troupes
allemandes dans la zone démilitarisée. Les demandes de réparations ne
seront pas honorées par l’Allemagne. Le 8 mars 1921, les troupes françaises
occupent à nouveau la Ruhr, et le 3 août 1922 la France commence à
travailler sur le système de fortifications de défense du territoire qui
aboutira à la Ligne Maginot. Le 8 novembre 1923, Adolf Hitler tentera son
putsch au Bürgerbräukeller de Munich.
Dans un autre registre, les commémorations franco-américaines sont aussi
chargées de symboles. Le 6 septembre 1919, le président Poincaré et
Chemin vers la fondation
Au printemps 1919, William Daus publie chez Hachette un petit guide de
Paris en langue anglaise dont il envoie un exemplaire à Perry le
22 avril 1919, mais en dehors d’un rappel au bon souvenir de Mulholland,
son message ne signale aucun progrès dans la constitution d’un club
parisien. Sans autres nouvelles durant le reste de l’année, Perry finit par
perdre patience et décide de changer de braquet. En février 1920, le Board
nomme ainsi des responsables spécifiques chargés de la constitution de
nouveaux Clubs dans des pays-cibles dont la France et l’Espagne. Pour la
France, le choix se porte sur John Edward Lloyd Barnes, past-gouverneur
du district du Royaume-Uni, qui s’était distingué en 1917-18 dans
l’organisation de l’accueil en Angleterre de permissionnaires du front
français, en liaison avec l’YMCA britannique. YMCA, encore… Pour l’Espagne,
le responsable nommé est Angel Cuesta, membre du Club de Tampa en
Floride, fondateur du Club de La Havane en 1916.
Pour comprendre le processus de naissance du Club parisien, il est utile
d’avoir à l’esprit le contexte des années de sortie de guerre. Le traité de
Versailles signé le 28 juin 1919 relève davantage de la symbolique que
d’une réelle volonté de paix. Versailles est choisi comme lieu de signature
pour effacer symboliquement la défaite française de 1871, car c’est ici, dans
la même Galerie des Glaces, que fut proclamé l’Empire allemand le
18 janvier 1871. Le projet de traité est remis à la délégation allemande le
7 mai 1919, date d’anniversaire du naufrage en 1915 du paquebot
britannique Lusitania torpillé par un sous-marin allemand et la date de
signature fixée au 28 juin est celle de l’anniversaire de l’attentat de
Sarajevo en 1914, déclencheur de la Grande Guerre. L’Allemagne ne se
résignera à signer que devant la pose par la France d’un ultimatum de cinq
jours au-delà duquel l’Armée française envahirait l’Allemagne. En raison
d’un conflit entre Républicains et Démocrates en période préélectorale, le
traité ne sera jamais ratifié par les États-Unis : il manquera sept voix au
Sénat pour la majorité des deux tiers requis pour la ratification des traités
internationaux.
Vu d’Allemagne, le traité est perçu comme un « Diktat ». France et
Allemagne demeurent irréconciliables. Déjà le 5 avril 1920, les troupes
françaises occupent la Ruhr en représailles de l’entrée de troupes
allemandes dans la zone démilitarisée. Les demandes de réparations ne
seront pas honorées par l’Allemagne. Le 8 mars 1921, les troupes françaises
occupent à nouveau la Ruhr, et le 3 août 1922 la France commence à
travailler sur le système de fortifications de défense du territoire qui
aboutira à la Ligne Maginot. Le 8 novembre 1923, Adolf Hitler tentera son
putsch au Bürgerbräukeller de Munich.
Dans un autre registre, les commémorations franco-américaines sont aussi
chargées de symboles. Le 6 septembre 1919, le président Poincaré et