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porter un peu d’argent. Moins d’une heure plus tard, Nicolas
arriva devant l’entrée de la propriété des Malartigues, située un
peu à l’écart du village.

Il eut quelque peine à reconnaitre les lieux tant les choses
avaient changé. Le vieux portail en bois n’était plus là. Celui
qu’il avait constamment connu ouvert à cause de ses battants
soudés à la végétation avait disparu. À la place, un imposant

porche lui faisait face. De hautes barrières en bois balisaient les
allées façon ranch. C’était massif mais très classe.

Le cœur serré, il entra dans la propriété.
La pelouse était tondue. Les herbages entretenus. Le corps
de ferme avait subi une bonne dose de rafraîchissements.
Aujourd’hui, de grandes baies vitrées laissaient entrer de la
lumière à l’intérieur de la demeure tandis qu’à l’époque, c’était
sombre à cause de petits carreaux crasseux. Il restait cependant
une chose qui n’avait pas changé : l’odeur. Nicolas avait
toujours aimé respirer l’air de la ferme. Un mélange de purin et
de foin impossible à retrouver au Vésinet. Cette madeleine de
Proust lui fit perdre quarante ans d’un coup. Il était redevenu le
jeune Nicolas Giordano qui avait l’habitude d’entrer ici comme
chez lui. Ça lui redonna confiance.
Lorsqu’il marcha en direction de la maison, son palpitant
s’alarma. Il avait beau avoir préparé ce qu’il voulait dire à son
vieil ami, il appréhendait les premières secondes de leur

rencontre. Comment allait-il réagir en le voyant apparaitre dans
son jardin vingt-cinq ans après leur dernier échange ?

Mais il était trop tard pour faire marche arrière…
Un berger allemand, tenu en laisse, aboya en le voyant
s’approcher. Pas d’aboiement agressif, juste un avertissement
pour satisfaire ses maitres qui l’avaient dressé pour ça. L’alarme
fonctionna parfaitement puisqu’une porte s’ouvrit dans les
secondes qui suivirent. Ce ne fut pas Alexandre qui se présenta

sur le perron mais une femme au sourire affable qui semblait

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