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La caméra est en effet située dans l'axe de tir du canon. Nous percevons
ensuite un plan sur l'atterrissage des parachutistes filmés en plan d’ensemble puis
très vite la mise en scène isole deux d'entre eux : les frères Tracy en les cadrant
en plan rapproché. Ceux-ci meurent en pleins atterrissages touchés par les canons
ennemis.

Le réalisateur a toujours ce désir de mêler la fiction à des événements
historiques réels. Dans cette séquence, nous retrouvons le travail de la voix off via
la lettre intime adressé aux parents : « quand vous recevrez cette lettre nous
serons sur le sol français. » Le débarquement sera à nouveau traité dans les
Misérables où la dimension épique et spectaculaire se trouvera renforcée.

La représentation filmique de la seconde guerre mondiale se clôt avec les
séquences suivantes : la libération, l'épuration. Le reste du film aura une dimension
plus fictive, l ’Histoire sera moins importante, Lelouch se concentrera à filmer la vie
intime et le destin des personnages .Il faut noter toutefois que le réalisateur
évoquera brièvement la guerre d'Algérie et qu'il apportera une ouverture sur la
société contemporaine de l'époque : à savoir la fin des années 1970 et le début
des années 1980.

La séquence de la Libération en France montre ainsi une alternance de
plans d'ensemble et plans rapproché sur la foule, dansant avec les soldats anglais
et américains.

La caméra mobile filme un mouvement de joie et d’euphorie pour la
population libérée. Jack Glenn et son orchestre sont présents dans ce mouvement
de joie. Parmi les danseurs, la caméra isole le personnage d’Évelyne. Dès la
séquence suivante : celle-ci sera huée et humiliée par la foule. Alors que la
musique hors champ de l ‘orchestre de Jack Glenn continue, un raccord image
évoque l’épuration ethnique avec le personnage d'Évelyne (filmé dans un cadre
serré), crâne rasé arrêté par des militants armés et portant la pancarte autour du
cou inscrite par la foule « elle couchait avec les Allemands, elle danse avec les
Américains. » Ainsi le réalisateur évoque autant la joie de la libération, que ses
débordements avec l'épuration. Ce plan séquence de la Libération se clôt par la
voix radiophonique du général De Gaulles, retransmise dans le restaurant où
chantait Évelyne : « Paris martyrisé, Paris outragé mais Paris libéré. »

Claude LELOUCH : une vision intimiste de L’Histoire 26
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